jeudi 11 juin 2015

Les leçons de vie

Première rencontre avec mon frère, découverte totale. Il m'invite chez lui et me présente à sa famille. Je découvre donc sa femme et ses deux filles. Une des deux, 6 ans, est atteinte de cécité depuis la naissance. Je ne suis pas spécialement à l'aise avec les personnes "différentes", j'ai toujours peur de mal faire, ou d'être maladroit (ce qui s'est d'ailleurs passé mais bon, je pense que ses parents ont l'habitude).
La présentation commence par un "t'es qui toi?", phrase qu'elle s'est appropriée puisque certains, sur le ton de l'humour, la surnomme de la sorte. Je lui explique donc que je suis "son tonton" qu'elle ne connait pas encore. La journée se poursuit et la petite me sollicite souvent pour jouer à ses jeux. Nous commençons un coloriage et elle me dit "je vais faire un dessin avec du violet!"... un peu surpris de l'entendre parler de couleur, je joue donc mon rôle et dessine avec elle, elle toujours très naturel et finalement pas si différente. Elle me prend ensuite la main pour me diriger vers le canapé, toujours dans une mouvance qui ne laisserait pas penser qu'elle ne voit que la pénombre puis me dit toujours aussi naturellement "on regarde la télé?"... là j'avoue être un peu déstabilisé mais je la laisse faire et constate qu'elle tend l'oreille pour "regarder" son dessin animé. Tous ses sens sont en éveil pour combler celui qui ne fonctionne plus. Elle part ensuite jouer dans le jardin à cache-cache avec mes enfants, puis remonte dans sa chambre à l'étage, elle vit simplement comme on le fait tous. Mieux, elle ne se plaint de rien et elle est pleine de vie...
J'ai depuis l'enfance de fortes acouphènes qui parfois m'obsèdent et m'amènent à des états de stress aigu. Cela fait trente ans que ces sifflements et ces bourdonnements accompagnent mes nuits, heureusement la journée le bruit ambiant les couvre, mais le soir, quand le silence se pose, c'est la symphonie disharmonieuse. Suite à la rencontre avec cette petite, je culpabilise désormais de me plaindre intérieurement quand je me dis "foutue sifflement!". Même si l'âge est venu pour moi de porter des lunettes, car je commence à voir flou, je peux lire, contempler, regarder le visage de mes enfants... cela parait pourtant tellement banal mais finalement c'est un privilège.
On se dit trop souvent qu'il y'a toujours mieux, mais il y'a aussi toujours pire. Et ce qui est encore plus surprenant, c'est que ces personnes pour la plupart, croquent la vie! Pendant que nous, nous plaignons ;-)

Illustration : ce que voit ma nièce, juste les fortes sources lumineuses.

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