mercredi 26 juin 2013

Burn-out


Je tenais à écrire ce billet, pour raconter mon vécu du burn-out toujours dans l'idée que ceux qui en vivent les prémisses se reconnaîtront et réagiront à temps... Mieux vaut prévenir que guérir...

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Il y'a maintenant un peu plus de 12 ans, je quitte la société dans laquelle j'ai suivi ma formation d'informaticien par alternance. Mon responsable de l'époque me remercie en me disant "tu ne mérites pas mieux qu'un SMIC". Par la suite, l'opportunité d'intégrer une société de service m'est offerte. Mon rôle : assurer le dépannage informatique (téléphonique et sur site) et installer les matériels nécessaires aux utilisateurs. Mes petites compétences de passionné d'informatique allaient me servir. Mon travail me plaisait, j'étais reconnu dans le service. On comptait sur moi et j'aimais ça. J'étais envoyé également à travers toute la France. Je vivais ma petite vie d'informaticien comblé, voiture de fonction, téléphone et nuit d'hôtel. Je rencontrais beaucoup de monde et recevais régulièrement des retours positifs des utilisateurs ainsi que de ma direction. De plus, j'avais une certaine autonomie, la confiance que l'on me portait me permettait cela.
Au fil du temps, mes compétences évoluaient, mon "grade" également : d'employé à cadre, de technicien de maintenance à chef de projet. Je m'occupais des "petits" ordinateurs, maintenant des "gros" (serveurs) dans les salles informatique. Je gère maintenant des projets : réunion, organisation et planification (tout ce que je n'aime pas faire).
Les journées n'étaient plus suffisantes pour accomplir mes tâches. Je commençais à rallumer mon ordinateur chez moi le soir, puis les week-end, puis pendant les vacances, puis les nuits..... J'étais de plus en plus appelé pendant mes congés par mes responsables pour des problèmes divers. Cette "toute puissance" me valorisait. Je me sentais indispensable à la société, apparemment le seul à savoir accomplir certaines tâches bien précises.
Petit a petit, une sorte de mauvaise humeur s'installait en moi. Je commençais à ne plus supporter les réflexions, même sur le ton de l'humour. Une sorte de démotivation aussi. Pourtant le travail me plaisait toujours autant.
Par la suite, une société fut rachetée par la mienne. S'ensuit une mutualisation de notre informatique. A ce moment, je dois fournir encore plus d'effort (migration de 300 personnes et donc de toute l'informatique associée).
Depuis plusieurs jours, je commence à avoir du mal à m'endormir. Je suis pourtant fatigué.... mais impossible de m’endormir. Je tourne en rond, gigote, pense, repense, rumine... Autant utiliser mon temps à ne pas dormir pour travailler. Il est 4 heures du matin, je ressors mon ordi, j'ai tellement de travail à abattre! Mon responsable me remerciera...

Une soirée entre femme est organisée. Je suis donc de "garde" avec les enfants. Je sens déjà que la soirée sera difficile car le simple fait de fermer les yeux et je m'endors sur le canapé. Une fatigue jusqu'à maintenant jamais vécue... Je commence à me sentir étrange.... comme angoissé... et d'un coup une lourdeur sur les épaules, comme si on me déposait des sacs de ciment sur chacune d'elles! Je sens vraiment mes épaules "tomber". Mes muscles m'abandonnent, à bout de ressources. Un frisson me parcours, du bas de mon dos au sommet de ma nuque?!? L'angoisse s'amplifie, je suis seul avec mes enfants, que se passera t il si je fais un malaise? Je décide de coucher mes enfants précipitamment pour ne pas avoir à les gérer si jamais je fais un malaise (on me trouvera par terre mais au moins les enfants n'assisteront pas à la scène).
Les enfants sont couchés, je tourne en rond dans mon salon. Je me sens perdu, plus possible de réfléchir calmement, des milliers d'idées me traversent l'esprit, des choses insignifiantes, des images, des idées, tout un mélange incohérent de pensées. Que faire? je décide d'aller me coucher. Nuit catastrophique évidement.
Je me réveille dans le même état qu'en me couchant. Je me sens mal, angoissé, plus démotivé et fatigué que jamais mais je pars malgré tout au travail, en oubliant la moitié de mes affaires, laissant une fenêtre ouverte, mon ordinateur etc. Je manque même d'écraser quelqu'un à un passage piéton, plus aucune attention, impossible de me concentrer ne serait-ce que sur ma conduite.
Tous les jours sont éprouvants, mon esprit se focalise sur ce mal être devenu si profond.
Je commence à ne plus avoir faim, d'ailleurs je ne peux plus manger. Restaurant un soir entre amis (auquel je n'ai pas envie d'aller à cause de tout ce chamboulement). Je prétexte une envie d'aller aux toilettes pour vomir. Je perds 8 kg en 1 mois...
On commence à me demander ce que j'ai, je deviens livide, je ne rigole plus, je m'isole. Envie de pleurer...
Au bout de trois longs et interminables mois, j'en parle à ma femme. Incompréhension totale de sa part, elle pense que le problème vient d'elle. La discussion par la suite n'est pas ouverte sur le sujet. J'en parle également à mon responsable qui me dit que la charge de travail actuelle n'est que ponctuelle et que bientôt, le rythme habituel reprendra son cours. Je continue donc à vivoter, tant bien que mal jusqu'au jour ou je décide d'abandonner le combat.
Je prends donc rendez-vous chez le docteur en urgence, premier rendez vous du matin. Je lui explique mon aventure, j'essaye de me contrôler pour pouvoir lui expliquer précisément mon ressentit. Son verdict est rapide :"un petit coup de déprime, je vais vous donner des petits calmants". Je lui réponds que je pense que c'est bien plus profond que cela et que je pense faire une bêtise si on m'enlève pas ses pensées de ma tête. Il décide donc de m'administrer des antidépresseurs. Je commence donc le traitement sans aucune recommandation de sa part. Au bout de 3 ou 4 jours, le soir, je suis tremblant, en sueur, en panique! ma première crise de panique! Je décide d'appeler les urgences, ce n'est plus possible il faut que ça cesse, et rapidement! La personne que j'ai au téléphone me conseil de poursuivre le traitement car il n'est efficace qu'au bout de 2 semaines minimum et d'y ajouter un décontractant musculaire juste pour ce soir. Il me recommande surtout d'aller voir un psychiatre. Coup de chance, je prends la place d'un rendez vous annulé quelques jours seulement après. Le lendemain, premier réflexe étrange, j'appel ma mère... en pleure. N'entendant que mes sanglots, sa première question est "qu'est il arrivé aux enfants?!?" ma réponse sera "c'est ton fils qui va mal!". J'arrive enfin chez le psychiatre. Impossible de lui dire ne serait-ce que "bonjour". Je suis en pleurs, impossible de m'arrêter. J'arrive juste à lui dire que je ne comprends pas ce que j'ai...
Il sort un vieux "grimoire" (appelé DSM pour Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) de psychiatre et me fait lire un texte contenant des symptômes (lire page 496 du livre DSM (pas du document PDF)) auxquels je réponds à chaque fois oui de la tête pour dire que je suis concerné. Le verdict tombe, je suis en pleine dépression associée à des crises d'angoisses. Mon traitement est réévalué, il m'administre un antidépresseur appelé Paroxétine, plus adapté à mon cas, et aussi un anxiolytique appelé Lysanxia. Arrêt de travail de 2 semaines pour que le traitement aie bien le temps d'agir. Quelques jours suffisent enfin à calmer ma tristesse et mes angoisses... enfin, une petite éclaircie...
Les 2 semaines passent et je retourne au travail. Mes collègues ne me reconnaissent plus. J'ai changé physiquement et psychologiquement. Certains me conseillent d'arrêter les médicaments, pensant que c'est cela qui me détruit, d'autres de me ressaisir (j'adore ces gens là......).
J'entreprends ensuite une psychothérapie et décide de prendre rendez vous...

To be continued....

Illustration : Certains "crament" parmi d'autres le tout dans l'indifférence la plus totale...

samedi 22 juin 2013

Manque de confiance

Aujourd'hui, dernier tournoi de foot de la saison. Parents contre enfants. Tous les parents volontaires sont invités sur le terrain.
J'aime scruter les attitudes des personnes, leurs charismes, leurs prestances, leurs mimiques... Il y'a le silencieux, pas la peine de parler pour se faire comprendre. Il y'a le "beau gosse" qui impose le respect de part son physique. Il y'a le meneur, que tous les joueurs écoutent. Il y'a le rigolo, qui anime l'évènement. Il y'a l'athlète, que tout le monde admire... Tout un panaché de caractères que j'aime étudier... Certains se connaissent déjà en dehors du club. Des groupes de copains se forment donc. Et il y'a moi.
Coup de sifflet, début du match, la balle est lâchée dans "l'arène".
Les parents s'échangent la balle, miment une bataille difficile et sans relâche contre les enfants (au passage, j'adore cette naïveté, celle des enfants, qui n'y voient que du feu, qui se confondent avec David contre Goliath, qui jubilent à l'idée de battre les "grands"!). Et à un moment, la balle arrive à mes pieds.
J'ai toujours douté de moi, toujours eu une défaillance au niveau de mon estime personnelle. Tout le monde attend après moi. Que faire de cette balle? la conserver, au risque de me la faire prendre? la renvoyer, au risque de louper le tire? Je dois prendre une décision rapidement car toute l'attention est portée sur moi. Tous les jugements sont en train de se faire. Je décide donc de jouer le maladroit en perdant (ou plutôt en offrant) la balle aux enfants. Beau subterfuge sur ce coup là, surtout qu'on est là pour cela, jouer en notre défaveur, nous sommes là pour eux, là pour perdre et cela m'arrange.
A un moment, un père lance une stratégie "maintenant, on va marquer un peu". L'enjeu n'est plus le même, la performance entre en jeu, chaque parent va donc exposer ses compétences de footballeur. La plupart sont en club, chaussures à crampons aux pieds, maillots de leur équipe. Et il y'a moi.
La balle m'est envoyée à nouveau. Je dois agir rapidement. Je décide de refiler la "patate chaude" au plus proche. Inutile de conserver la balle trop longtemps, je risque de me faire démasquer en loupant un drible!
Voilà comment se manifeste, chez moi, le manque de confiance. Un perpétuel questionnement. Pour l'achat d'une simple baguette, c'est idem (cuite? pas trop cuite?). Peut être le besoin de toujours "trop bien faire" les choses, je ne me permets pas l'erreur, pas le droit de décevoir....
Après cinq matchs, le coup de sifflet final est donné. Nous avons gagné autant que perdu. Les enfants sont fières d'eux, les parents également car leur rôle a été respecté : donner du rêve aux enfants.
Malgré mes lacunes de footballeur, ma chance m'a été donnée autant qu'aux autres. J'ai accompli mon devoir en défendant mon camp et en tentant de bonnes passes. De plus l'ambiance était bonne, aucune reflexion particulière, aucune rancoeur concernant les loupés des uns et des autres.
Finalement, l'estime de soi est basée sur notre propre jugement. Un jugement parfois corrompu par son vécu, les moqueries de jeunesse, ou encore un manque de valorisation. Ces mauvaises habitudes je les ai toujours. Pourtant il suffit "simplement" de ne pas se centrer sur soi même. Après tout, peu importe ce que l'on pense de moi, peu importe le regard que l'on me porte, du moment que j'ai fait de mon mieux... A chacun ses compétences, valeurs, caractéristiques. Je suis certainement bon là où d'autres sont mauvais, et inversement.

Illustration : mon fils "Lulu", 6 ans, juste avant un shoot dans le but qu'il défendait

mercredi 19 juin 2013

Musique émotionnelle

Le matin, sur la route du travail, j'aime écouter des musiques douces, voir mélancoliques. La mélancolie, cette douce tristesse... cette tristesse joyeuse...
Dans ces moments de confiance et de sérénité, j'en profite pour me faire un "shoot émotionnel" en écoutant par exemple SomehowHometown GloryMad World ou encore Colorblind (sortez les mouchoirs!).
J'aime ces petits moments de solitude, seul avec mes émotions, avec mes pensées. Ces émotions expérimentales, ces échantillons, sont comme un vaccin, une injection de faible mal être permettant l'apprentissage de la défense, la rééducation du bien être.
C'est étrange ce besoin, parfois, de se faire un peu souffrir. Ma compagne elle aussi, parfois, aime s'affliger des moments émotionnels douloureux en imaginant des évènements tristes. Comme s'il était necessaire de se faire souffrir pour se rappeler ce qu'est le bonheur. A croire que l'on ne sait plus l'atteindre sans artifices.
Mais parfois, cette épreuve m'est difficile, voir impossible. Obligé de changer de musique ou d'éteindre l'autoradio. Besoin de silence, aucun stimuli émotionnel nécessaire pour flirter avec la tristesse.
Alors je prends mon mal en patience et j'accueil cet état d'âme en essayant d'en comprendre l'origine et  sans le laisser prendre de l'ampleur. Ensuite, je l'ignore, le laisse vivre, puis mourir (la méditation apprend cela).
Je me sers d'ailleurs de cela pour jauger mon état émotionnel (ce que j'ai baptisé le feel-o-mètre). Dans mon métier, je participe parfois à des réunions. Je m'injecte un peu de mélancolie et j'attends la réaction.
Connaitre mon état émotionnel avant d'entrer dans "la cage aux lions", dans cette pièce ou chacun doit prouver sa compétence et défendre ses idées, me permet de mieux m'y préparer. Parfois je me sens fort et je pourrais donc m'imposer, parfois faible et dans ce cas, je laisse la parole à mes alliés.
Tout ce va et vient d'émotions permet de mieux valoriser chacun de ses états, puisqu'il permet de les comparer, et de mieux apprécier les moments de bien être..

lundi 3 juin 2013

Corps et esprit

Suite à mon "burn-out", j'ai décidé de me reprendre en main. Reprise en main psychologique (lecture, discussion et compréhension autour de cette maladie) mais aussi physique grâce au sport, plus précisément le footing. Le sport étant bon pour les états dépressifs puisqu'il permet la libération de neurotransmetteurs tels que la sérotonine, agissant sur l'humeur, ou encore les endorphines, agissant sur le bien être.
Au début de mon entrainement, il m'était très difficile de dépasser 1km! Surement lié au fait que je n'ai jamais été sportif de ma vie. Au fil du temps, ma distance s'allongeait, le souffle me manquait de moins en moins. Désormais je fais mes 8 km une ou deux fois par semaine.
Ce que je remarque malgré tout est que, en fonction de mes états d'âmes, l'effort est plus ou moins agréable et difficile. Par exemple, dans mes moments de tristesse, lorsque je me laisse envahir par des ruminations lourdes, difficiles à évacuer, qui finissent par prendre le dessus sur mes pensées, je le sens, dès le début de l'exercice, le souffle est déjà court, le plaisir n'est plus là, l’essoufflement arrive vite.
Parfois, lorsque je cours, quand j'atteins ma limite physique, je ressens un palier psychologique, comme un message très claire, émis par mon cerveau, qui me prévient qu'il est temps d'arrêter de courir car les ressources sont arrivées à épuisement. Quand je me sens serein et calme et que je débute une course, ce message ne m'est jamais transmis. Mieux, je peux atteindre des distances inimaginables pour moi : mon record 12km en 1h18.
Ce que je peux déduire de cette expérience est que l'esprit contrôle le corps et pas l'inverse. Que la volonté et la persévérance permet tout ce que l'on souhaite. Que les limites du corps ne sont peut être que celles de l'esprit et qu'il est donc possible de les repousser (ce qui confirme donc "l'elasticité du cerveau").
En tout cas, à tous les nons sportifs, dont je fais(faisais?) parti, le sport est un réel exutoire. Il est vrai que cela représente un effort très difficile à fournir pendant la période de dépression, je dirai même qu'il est impossible de se motiver à en faire pendant ces phases difficile à vivre. Il faut donc se lancer dès la moindre petite éclaircie de morale.
L'endorphine ressemble aux opiacés (dérivé de l'opium) et je comprends mieux, car je la ressens, cette dépendance dont parles les grands sportifs. L'effet de bonheur ressentit (pas à mes débuts, je l'avoue) est réel et même étrange car même dans la souffrance, quand je termine une course, j'ai très rapidement l'envie de recommencer.

Illustration : le corps alimenté par l'esprit